Philippe Pichery : «Je ferai tout pour éviter la création de groupes politiques au Département»
Philippe Pichery, vous êtes candidat aux élections départementales du mois de juin et candidat à la présidence de cette assemblée. Où en êtes-vous dans votre démarche ?
Je suis effectivement candidat sur le canton de Creney-Méry-Plancy, avec Claude Homehr. Je suis déjà très avancé, mais j’ai bien conscience que cette élection n’est pas la priorité de nos concitoyens. Pour autant, pour moi, il y a quelque chose de très important : c’est la première fois qu’on a en France à la fois les élections départementales et les régionales et seulement neuf mois avant une élection présidentielle. Ça va influencer fortement ces élections.
Vous voulez dire que ces élections pourraient être très politisées ?
Exactement, et c’est très clairement l’axe de ma stratégie. Je vais passer beaucoup de temps pour expliquer que cette élection départementale est très importante, qu’elle a beaucoup de sens pour la vie quotidienne des gens par les missions de proximité, de solidarité qu’exerce le Département. Mais il faut à tout prix éviter que cette élection soit détournée de son objet, confisquée à d’autres fins. Les partis politiques comptent bien utiliser ces élections pour marquer leur territoire, préparer le coup d’après, compter leurs sympathisants.
Les Républicains font le forcing auprès des élus en place et des futurs candidats en vue de la création d’un groupe politique LR au sein de l’assemblée départementale. Quelle pourrait être la conséquence de cette initiative ?
C’est pour moi l’enjeu principal de ces élections dans l’Aube. Il s’agit pour moi de préserver, de conforter notre modèle aubois qui est unique. On a un modèle dans lequel rien ne se fait de significatif sans l’aide du Département pour l’action publique. Ce n’est pas partout pareil.
On a des compétences humaines et des moyens financiers, certes. Mais on a surtout, et c’est le modèle aubois, une réactivité hors du commun. Aujourd’hui, le facteur temps est souvent déterminant. Là où des collectivités amies ou l’État prennent six mois ou un an pour prendre des décisions, on prend quinze jours ou un mois. Exemple le robot chirurgical pour l’hôpital, ou le plan Covid, les aides d’urgence… Ce modèle, il faut le préserver.
Et si l’assemblée devient davantage politisée, vous pensez que ce sera plus compliqué ?
Oui, j’en suis intimement convaincu. On a une assemblée où la politique de partis n’est pas présente. Ce qui n’exclut pas les débats, notamment tous les lundis matin avec les neuf vice-présidents. L’argument selon lequel il faudrait une opposition qui rentre car sinon on serait dans un système sclérosé, c’est faux, c’est un argument fallacieux. On a de vrais débats d’idées, parfois des oppositions. Après on tranche et on avance. En tout cas, pas de conversation stérile. Comme parfois à la Région, la première demi-journée des débats, c’est du théâtre, on s’invective, parfois on s’insulte, c’est tout.
Une spécificité du conseil départemental de l’Aube, c’est qu’il n’y a pas d’opposition mise à part un élu, Marc Bret, divers gauche. Quel est le secret de ce consensus, quand on voit que la quasi-totalité des rapports sont votés à l’unanimité ?
Il faut dire que la matière sur laquelle on travaille est propice au consensus. Exemple : les travaux dans les collèges ou bien l’action sociale. Les sujets traités ne relèvent pas de la politique politicienne. Mon combat sera de préserver ce modèle aubois, très vertueux. Et donc je ferai tout pour éviter la constitution de groupes politiques. Je sais que c’est l’objectif des Républicains, mais d’autres partis aussi.
Vous ne pouvez pas vous y opposer légalement…
Non, mais je fais tout pour convaincre. Il y a dix-sept cantons dans l’Aube, et trente-trois élus de la majorité départementale. Au moins un tiers de l’assemblée sera renouvelé, de matière naturelle. Il y aura donc du sang neuf. Tous ceux qui vont se représenter m’ont confirmé, quelle que soit leur appartenance dans un parti politique, sur les quinze cantons où au moins un élu repart, qu’ils seront majorité départementale s’ils sont élus, et qu’ils n’intégreraient pas un groupe politique. Il y a aussi deux cantons où les deux sortants ne se représentent pas, Brienne-Piney et le Nogentais. Des gens de qualité sont en préparation de candidature. Ces gens-là m’ont aussi confirmé qu’ils siégeront dans la majorité départementale.
Les critiques de Marc Bret portent souvent sur les questions sociale et environnementale. Ces thématiques vont-elles enrichir votre programme ?
C’est bien sûr en bonne place dans le programme que nous présenterons le moment venu. Depuis six ans, il y a eu des évolutions sociétales considérables, avec les problématiques de climat, d’énergie, de l’eau, de l’inclusion numérique avec le risque de cassure dans la société. Tous ces sujets, on les intègre dans le programme avec l’enseignement supérieur, Clairvaux, Paris 2024…
Dans quels secteurs le Département peut-il encore investir de manière importante ?
Je pense à l’enseignement supérieur, ou encore les mobilités avec les voies douces qu’il faut encore renforcer, avec un rôle de mobilité du quotidien, et un rôle touristique.
Vous avez évoqué Clairvaux. C’est un des gros projets dans lesquels le Département peut investir ?
Oui. Il y a eu des propositions intéressantes. On a une base d’accord, Clairvaux doit garder son unité, ne peut pas être démembré. Il faut un projet global, cohérent. Un groupe de travail est en place. Des études vont déboucher en 2022 sur la consultation des porteurs de projets. Clairvaux 2030 est en route. En tout cas, le site ne pourra pas être dédié à une seule thématique.
On oppose parfois le Département, la collectivité, en bonne santé financière, et le département de l’Aube et les Aubois, avec un niveau de vie inférieur à la moyenne nationale. Que peut faire le Département contre cela ?
C’est un travail de très longue haleine. L’économie locale s’est déjà transformée avec l’enseignement supérieur. Il faut continuer, et puis renforcer encore la qualité de vie.
Soutien à Jean Rottner
Pour les élections régionales, Philippe Pichery a décidé d’apporter son soutien à Jean Rottner (LR) « à titre personnel ». « Mon soutien à l’homme, pas au leader politique. On a appris à se connaître, on n’a pas toujours été d’accord. Mais je pense qu’il tient bien les commandes. On a bien besoin de stabilité durant le prochain mandat. Le premier mandat des Régions a été consacré à l’harmonisation de ce qui existait dans les trois régions précédentes. Ça n’a pas permis de prendre en compte suffisamment les spécificités locales. L’enjeu du mandat à venir, c’est celui-là, et ne plus être dans un cadre unique, très réducteur. Et pour cela, on a besoin de stabilité ».